Impact de l’éolien sur l’immobilier, mythes et réalité
S’il est un sujet qui divise partisans et adversaires de l’éolien, c’est bien celui de l’incidence de la proximité d’un parc éolien sur le prix de l’immobilier. Comme vous l’aurez compris, nous sommes résolument contre l’implantation d’éoliennes dans notre bocage, et notamment contre le projet de Saint-Ange-le-Vieil. Beaucoup d’absurdités ont par contre été avancées, tant par les pro- que par les anti-éoliens, et il me semble important de jeter sur le sujet un œil objectif.
Un recours biaisé aux statistiques
Comme tout bon professionnel saura vous le confirmer, il n’existe pas UN marché immobilier, mais une multitude de micromarchés, selon la position géographique, l’environnement, l’état du bien, ou encore les services disponibles dans la commune considérée. Sur une longue période de temps, les prix fluctuent à la hausse ou à la baisse, les biens se déprécient ou s’apprécient en fonction des travaux réalisés et de la conjoncture. Comment, dès lors, ajouter foi à des études statistiques qui ne seraient pas menées à la fois sur une période de temps suffisamment longue et sur un nombre de transactions suffisamment important pour lisser toutes ces variables ? Ce sont pourtant des biais qui régissent la plupart des études mises en avant par les défenseurs de l’éolien. Vous pourrez en trouver quelques exemples ici (vous noterez d’ailleurs que cette étude, reprise dans de nombreux médias, a été réalisée par… un stagiaire), là, ou là encore.
Ces mêmes biais apparaissent dans les sondages et enquêtes d’opinion régulièrement mis en avant par les industriels de l’éolien. Ainsi, un des derniers sondages dont les promoteurs se font les choux gras, commandé auprès du CSA par France Énergie éolienne, a-t-il été réalisé auprès de «506 individus âgés de 18 ans et plus représentatifs de la population française habitant dans une commune située à moins de 1 000 mètres d’un parc éolien». Le problème est que cet échantillon, aussi honorable et quantifié soit-il, ne représente qu’une frange anecdotique de l’ensemble de la population française: aucun habitant d’Ile-de-France par exemple, des personnes vivant en majorité (56 %) dans le Nord ou le grand Ouest. Plus grave, si ces communes sont situées «à moins de 1 000 mètres d’un parc éolien», le sondage ne dit pas où sont situées les habitations des personnes interrogées elles-mêmes. 2 000 m, 3 000 m, plus encore, compte tenu de l’étendue des communes concernées ? Mystère. Dans tous les cas, il est extrêmement abusif de parler de personnes vivant «au pied d’une éolienne», comme le titrait pourtant BFM TV.
Une désinformation généralisée
Les défenseurs de l’éolien sont de grands manipulateurs d’information, mais ils ne sont pas les seuls, loin de là. Dans cette nébuleuse de statistiques faussées ou tordues, une étude de 2 014, menée par la London School of Economics à partir d’un million de transactions immobilières en Angleterre et au Pays de Galles, entre 2000 et 2012, fait exception, de par l’ampleur de l’échantillon retenu. Malheureusement, les résultats de cette étude ont été largement exploités de manière partisane, tant par les sites anti-éoliens que par certains sites dédiés à l’immobilier. Selon eux, la dévaluation serait de l’ordre de 11 % pour les habitations situées à moins de 2 km d’un parc éolien. Ce qu’ils oublient tout simplement de dire est que si l’étude a constaté un tel niveau de dévaluation, c’est au voisinage de parcs de plus de 10 éoliennes !
Dans un cas comme celui qui nous concerne directement, la dévaluation constatée «n’est que» de l’ordre de 5 %. Mais est-il vraiment nécessaire de jouer une telle inflation, au risque de complètement se décrédibiliser ? Non. Ce chiffre est loin d’être anodin. Pour une commune telle que la nôtre d’environ 110 foyers, d’une valeur moyenne de 200 000 euros, 5 % équivalent à une dévaluation de plus d’un million d’euros. Une perte sèche, et immédiate, de la valeur de notre patrimoine immobilier, que les revenus «espérés» (mais c’est là un autre sujet, que nous avons notamment abordé dans la présentation faite lors de la réunion d’information du 11 mars) par la commune seraient bien loin de compenser.
Les dégâts se font déjà sentir.
D’autres chiffres, de 10, 15, 20 voire 40 % de décote, circulent également. Mais là encore, il s’agit en grande partie de manipulation. Ces chiffres concernent des jugements rendus à travers la France à l’encontre de propriétaires, désireux de vendre leur bien, ayant omis de déclarer l’existence d’un projet éolien sur leur commune à leurs acheteurs. Le dernier exemple en date est celui de la vente d’un haras, pour laquelle le vendeur et son notaire viennent d’être condamnés par le Tribunal de grande instance d’Argentan.
Dans tous ces cas, le préjudice, tel que constaté par le tribunal, concerne bien moins la décote due à l’existence du projet éolien que son passage sous silence ; c’est ce délit que le juge a voulu sanctionner, et en fonction duquel des dommages et intérêts ont été calculés, sans qu’il y ait nécessairement de rapport direct entre les deux.
Reste qu’un projet éolien, à quelque étape qu’il soit, est ravageur pour l’immobilier. Si, en-dehors de la dévaluation constatée de 5 à 6 %, il y a une chose à retenir de l’étude citée plus haut, ce serait l’analyse qui y est faite d’une autre étude, fréquemment citée par les proéoliens (elle conclue en effet «qu’il n’y a pas de preuve statistique de l’influence des éoliennes sur la valeur des maisons avoisinantes»), et menée aux États-Unis en 2013 : il y a très peu de transactions au voisinage des éoliennes. En d’autres termes, nos maisons sont actuellement pour une large part invendables. C’est l’expérience qu’en fait déjà un habitant de Saint-Ange qui souhaitait vendre la sienne, et pour laquelle l’acheteur potentiel a annulé la promesse de vente en apprenant l’existence du projet éolien. Les premiers dégâts se font hélas déjà sentir. Nous attendons de pied ferme ceux qui oseraient le nier.